Le secret de la mort – Khalil Gibran


Vous voulez connaître le secret de la mort.
Mais comment le trouverez-vous sinon en le cherchant au cœur de la vie ?
Le hibou aux yeux nyctalopes aveuglés par le jour ne peut dévoiler le mystère de la lumière.
Si vous voulez voir l’esprit de la mort, ouvrez grand votre cœur « au corps de la vie »
Car la vie et la mort sont une, comme le fleuve et la mer sont un.

Dans la profondeur de vos espoirs et de vos désirs se trouve votre connaissance silencieuse de l’au-delà ;
Et telles des semences rêvant sous la neige, votre cœur rêve du printemps.
Faites confiance aux rêves : en eux est cachée la porte de l’éternité.
Votre peur de la mort n’est que le frisson du berger lorsqu’il se tient devant le roi dont la main va se poser sur lui pour l’honorer.
Le berger tremblant ne se réjouit-il pas de cet honneur ?
Pourtant n’est-il pas plus conscient encore de son tremblement ?

Mourir, qu’est-ce d’autre que se tenir nu dans le vent et se dissoudre dans le soleil ?
Et qu’est-ce que cesser de respirer, sinon libérer son souffle des courants qui l’agitent pour lui permettre de s’élever, se dilater et, délivré de toute contrainte, retrouver sa source ?

Ce n’est que lorsque vous boirez à la rivière du silence que vous chanterez vraiment.
Quand vous aurez atteint le sommet de la montagne, vous commencerez votre ascension.
Et lorsque la terre réclamera vos membres, c’est alors que véritablement vous danserez.

Khalil Gibran, Le prophète – 1923


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